L’UCI a collaboré en 2016 avec Hurricane pour mettre en place la première édition de la Coupe du Monde BMX Freestyle Park UCI. Qu’en aviez-vous pensé à l’époque ?
Ryan : Hurricane organisait déjà le FISE World Tour, un circuit qui connaissait alors un franc succès depuis près de 20 ans. Je n’avais donc pas beaucoup de réserves quant à leur capacité à travailler sur la Coupe du Monde BMX Freestyle Park UCI. Je souhaitais simplement que les choses continuent à aller de l’avant.
Qu’attendiez-vous lorsque le Comité international olympique (CIO) a décidé de venir à Montpellier en 2017 pour voir si le BMX Freestyle Park avait sa place aux Jeux Olympiques ?
Ryan : Je ne savais vraiment pas trop quoi en attendre. Je crois que beaucoup de gens craignaient que le CIO n’apprécie pas notre sport ou ne voie pas comment il pourrait faire partie des Jeux. En tout cas, la communauté freestyle n’aurait pas pu rêver d’une meilleure épreuve que celle de Montpellier pour montrer la discipline sous son meilleur angle. Le public répond toujours présent et la compétition ne déçoit jamais. L’ambiance y est formidable !
Vous avez été chargé pendant la compétition de répondre à toutes les questions que les deux inspecteurs du CIO pourraient avoir sur le BMX Freestyle. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Ryan : Cela a effectivement été un concours de circonstances intéressant. J’étais engagé sur plusieurs épreuves, mais je m’étais donné une mauvaise entorse à la cheville avant les qualifications. J’ai tenté ma chance malgré tout, mais je n’étais pas à 100 % et ne me suis donc pas qualifié pour le tour suivant en Freestyle Park. On m’a demandé à la place si je voulais bien rencontrer les représentants du CIO et leur présenter notre sport afin de leur donner une idée précise de notre culture. Nous avons déjeuné ensemble, fait le tour du site – en boitant pour moi (rires) ! – et assisté aux finales hommes et femmes du Freestyle Park. C’était vraiment sympa de regarder la compétition à leurs côtés. Ils étaient fascinés par l’événement, les épreuves et les athlètes. Je leur ai expliqué les figures, le processus de réflexion derrière la composition d’un run, les stratégies, le décompte des points et tout ce qui pouvait leur donner une meilleure idée de notre sport et les aider à ressentir la passion qui anime les riders lors d’un événement comme celui-ci. Tout le monde avait le sourire à la fin de la compétition, le plaisir a été partagé dans l’ensemble. J’étais très déçu de ne pas avoir pu participer aux phases finales à cause de ma cheville, mais je suis heureux d’avoir eu l’opportunité de présenter notre discipline aux personnes chargées de décider si elle avait sa place ou non aux Jeux Olympiques. On m’a fait savoir plus tard que j’avais joué un rôle important auprès d’eux et dans leur décision de nous inclure aux Jeux de Tokyo 2020.
Quel est selon vous le plus gros bénéfice que le BMX Freestyle Park pourrait tirer de sa présence aux Jeux Olympiques de Tokyo 2020 ?
Ryan : Je pense que de nombreux bénéfices se ressentiront à l’avenir, comme la croissance de notre discipline et sa diffusion auprès d’un tout nouveau public. Je suis pour l’instant très heureux du soutien que les athlètes reçoivent de la part de leurs pays pour les aider à se rendre sur les épreuves et, potentiellement, à participer aux Jeux. Je suis également TRÈS content que les femmes du monde du freestyle commencent à recevoir l’attention et le soutien qu’elles méritent. On peut s’attendre à les voir nettement grandir et progresser et ce sera très intéressant à suivre.
Entre la première Coupe du Monde UCI en 2016, les premiers Championnats du Monde UCI en 2017 et les Jeux Olympiques de la Jeunesse en 2018, il semble que la toile de l’UCI continue de s’étendre du côté du Freestyle Park. Que pensez-vous de cette évolution ?
Ryan : Je pense que c’est formidable et nécessaire pour les athlètes dans la perspective des Jeux Olympiques. Avoir davantage d’épreuves ne peut être qu’une bonne chose pour le BMX et le fait que ces épreuves aient lieu dans le monde entier est fantastique ! Tous les gros événements étaient dans le passé organisés aux Etats-Unis, mais on en trouve désormais sur les cinq continents. Je suis curieux de voir également quelles autres épreuves vont commencer à voir le jour au niveau national. Beaucoup de bonnes choses nous attendent.
À compter de 2018, les épreuves existantes ou les nouvelles épreuves de Freestyle Park peuvent être ajoutées au calendrier UCI, qui offre aux athlètes l’opportunité de marquer individuellement des points pour le classement UCI. Etait-il temps selon vous de structurer le calendrier du BMX Freestyle ?
Ryan : On a longtemps pensé que le Freestyle était impossible à structurer, mais je pense que cela a toujours été le cas, notamment du côté des épreuves. Il y avait par le passé, dans différentes disciplines, des circuits rassemblant plusieurs épreuves, avec des points et un classement général. Ces circuits étaient structurés et considérés comme des atouts de poids pour notre discipline. Le processus olympique n’est pas différent. Des points et des titres sont attribués, avec pour objectif final de concourir sur la plus grande scène qui soit. Et n’oublions pas que ce niveau ne représente probablement que 1 à 2 % de l’ensemble des pratiquants du BMX Freestyle. Vous pouvez toujours aller suivre des parcours dans les bois, vous retrouver en ville avec vos amis ou vous faire plaisir au park. Rien de ce qui arrive aujourd’hui ne changera cette réalité. Mais cela offrira des opportunités incroyables aux athlètes souhaitant évoluer au plus haut niveau.
Le fait que les épreuves locales soient organisées de la même façon que celles de la Coupe du Monde UCI permet aux athlètes de se préparer pour les grands rendez-vous. Dans quelle mesure cela constitue-t-il un avantage ?
Ryan : C’est une très bonne chose pour les athlètes souhaitant gravir les échelons du classement mondial. Si les riders s’habituent à ce type de compétition et à son format, nous pourrions voir émerger une toute nouvelle génération hissant le niveau à des hauteurs jamais atteintes. Avoir davantage d’épreuves au niveau local ou en ligne bénéficiera par ailleurs grandement au BMX Freestyle. Tous les athlètes n’ont pas les moyens de prendre l’avion pour se rendre sur une compétition. Plus les compétitions seront nombreuses et plus d’athlètes il y aura, ce qui fera logiquement grandir notre discipline.
Le Règlement UCI vise à ce que l’équité sportive soit respectée en régulant les temps d’entraînement, la durée des runs, le format de la compétition, les options en cas de problème mécanique… Est-ce une bonne chose ?
Ryan : Oui ! Il s’agit de faire en sorte que l’ensemble des athlètes puissent lutter à armes égales. Tout le monde s’entraîne exactement pendant la même durée, les mêmes jours, dispute le même nombre de runs pendant la compétition et respecte les mêmes règles en cas de problème avec son vélo. Cela permet vraiment au meilleur athlète de sortir vainqueur le jour-J.
Pendant des années, les choses n’ont pas toujours été simples pour les femmes en BMX. Il semble que les épreuves UCI les ont aidées en leur offrant davantage d’opportunités de concourir et certaines sont mêmes soutenues comme jamais auparavant…
Ryan : Oui, c’est génial ! Les athlètes féminines ont tellement fait pour progresser sportivement et montrer leur amour et leur dévouement au BMX Freestyle. C’est tellement agréable de les voir bénéficier des mêmes chances que les hommes et être reconnues à part entière au sein de la communauté freestyle. J’imagine que personne ne peut trouver une seule objection à ce que les pays soutiennent les femmes afin qu’elles puissent faire ce qu’elles aiment. C’est un gros plus ! Comme je l’ai déjà dit, j’attends avec beaucoup d’impatience de voir leur progression ces deux prochaines années.
Il est important de s’adresser aux jeunes athlètes. L’une des façons de le faire est l’Application UCI BMX Freestyle. Pouvez-vous nous la présenter ?
Ryan : L’Application UCI BMX Freestyle est en développement depuis deux ans désormais et c’est selon moi l’outil le plus puissant que notre sport n’ait jamais eu. Nous vivons dans un monde numérique, où les athlètes sont connectés dans le monde entier pour partager leurs performances et établir des contacts qu’ils n’auraient sans doute jamais été en mesure d’établir par le passé. L’application permettra aux athlètes de concourir en ligne au niveau local, national et mondial en téléchargeant des vidéos de leurs exploits et de leurs inspirations sur leur spot préféré. Selon l’épreuve, les meilleurs recevront des prix ou de l’argent et / ou des points UCI. Cela signifie qu’un athlète peut désormais légitimement gagner des points et progresser au classement mondial sans avoir à parcourir le monde. Cela dégage la voie pour atteindre le niveau Elite. Les compétitions numériques seront évaluées par des juges officiels et des grands noms de l’industrie. N’importe qui disposant d’un smartphone peut donc potentiellement se faire remarquer et voir sa vie changer. J’attends cet outil avec impatience depuis un bout de temps et c’est formidable de le voir enfin se matérialiser !
Vous avez, en tant que représentant des athlètes et membre de la Commission BMX Freestyle de l’UCI, déjà participé à quelques réunions de l’UCI. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
Ryan : C’est une grande responsabilité et je ne la prends pas à la légère. Je suis en position d’aider la discipline à prendre la bonne direction, tout en faisant en sorte qu’elle conserve ce pour quoi nous l’apprécions tant : son cœur et son âme. L’UCI n’avait en arrivant pas une connaissance énorme de notre sport, mais elle n’a jamais prétendu le contraire. Elle souhaite qu’il reste aussi génial que par le passé et que la transition dans la dimension olympique soit aussi douce que possible. Elle veut voir grandir le BMX Freestyle. Elle a été à l’écoute de mes idées, de mes retours, de mes critiques et mon expérience avec elle a été très positive. Pas de costards, de récupération institutionnelle ou de mainmise sur notre sport.
Qu’est-ce que cela fait de voir des amis de différents pays impliqués chez eux dans le développement du BMX Freestyle auprès de leurs Fédérations Nationales respectives ?
Ryan : Les compétitions font désormais un peu office de réunions d’anciens combattants (rires) ! J’avais l’habitude de concourir contre beaucoup de ces garçons, c’est donc formidable de les voir se diriger vers des positions qui peuvent aider à développer davantage notre sport dans leurs pays. Il y a toute une génération d’athlètes, parmi lesquels des anciens professionnels et des légendes de l’industrie, qui sont approchés par leurs fédérations pour les orienter et en apprendre davantage sur notre discipline.
Le BMX Flatland vient d’être ajouté au programme de l’UCI. Qu’en pensez-vous ?
Ryan : Je ne suis pas vraiment impliqué car je viens du Freestyle Park. Les spécialistes du Flatland impliqués sont en revanche des acteurs importants et je suis persuadé qu’ils sauront prendre les bonnes décisions, mettre en place les règlements et formats adéquats et orienter la discipline dans une direction qui l’aidera à grandir. Je pense qu’ils ont également compris les bénéfices à faire partie de l’UCI.
Comment voyez-vous le BMX Freestyle évoluer à l’avenir ?
Ryan : J’espère voir un vent nouveau souffler sur la discipline depuis la base. Le BMX a connu des moments difficiles ces dernières années et il nous faut davantage de jeunes sur les vélos et plus de choses à faire pour ces jeunes sur le vélo afin d’aider les communautés locales à vivre et grandir. Cela permettra aussi, je l’espère, les boutiques spécialisées à prospérer. Il nous faut plus de rassemblements, de compétitions locales, de journées vélo, d’ateliers pour les jeunes et d’activités en famille organisées non seulement par des boutiques locales, mais aussi par des individus passionnés soucieux de partager leur amour du BMX. Et tout cela à une plus large échelle. Plus de fun sur le vélo ! Une fois que ce sera le cas, je pense que l’industrie du BMX sera prospère également, ce qui aidera les entreprises vraiment dévouées à notre sport. Tout est lié selon moi. Nous devons construire des fondations solides à la base pour assurer un avenir radieux au BMX Freestyle.